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Amérique du Sud : les fleuves victimes d’une sécheresse historique

  En Amérique du Sud, la saison sèche s’est achevée fin octobre par un lourd bilan écologique. Des régions entières en Argentine, Paraguay, Bolivie ou Sud du Brésil, ont subi des conditions climatiques extrêmes, provoquant sécheresse, tarissement des fleuves et incendies.

 

 

Grave sécheresse dans une grande partie de l’Amérique du Sud

Selon l’Observatoire de la Terre de la Nasa, les signes de la sécheresse ont commencé à apparaître dans les observations gravimétriques par satellite au sud-est du Brésil à la mi-2018, et se sont propagés dans certaines parties du Paraguay, de la Bolivie et du nord de l’Argentine en 2020. Il s’agit de la deuxième sécheresse la plus intense en Amérique du Sud depuis 2002, si l’on considère l’étendue, la durée et le volume d’eau perdu pendant cette période.

La carte ci-contre montre le stockage des eaux souterraines peu profondes en Amérique du Sud le 26 octobre 2020, tel que mesuré par les satellites GRACE-FO (Gravity Recovery and Climate Experiment Follow On). Les couleurs représentent le percentile d’humidité, c’est-à-dire la comparaison des niveaux des eaux souterraines avec les enregistrements à long terme pour le mois d’octobre. Les zones bleues ont plus d’eau que d’habitude, et les zones orange et rouges en ont moins. Celles en rouge le plus foncé sont marquées par une sécheresse sévère dont l’occurrence d’apparition est une fois tous les 50 ans. L’Amérique du Sud est soumise au phénomène météorologique « El Niño » (provoquant des inondations) ou « La Niña » (sécheresses), présente cette année.

Les fleuves au plus bas cette année

En Argentine, les incendies auraient augmenté de 170 % cette année. Au Paraguay, la hausse serait de 46 %. Autre conséquence de cette période de sécheresse, exceptionnellement longue et intense : l’appauvrissement des fleuves.

Le fleuve Parana, un des plus puissants de la planète, qui prend naissance au Brésil et se jette dans l’Océan atlantique, par l’estuaire du Rio de la Plata (Argentine), n’avait jamais été aussi bas depuis 1970. À Rosario, dans l’est de l’Argentine, le niveau était en août de 80 cm, contre 3 à 4 mètres normalement à cette période de l’année. Idem pour le fleuve Paraguay, principal affluent du Parana qui coule du nord au sud et traverse le Brésil, la Bolivie, le Paraguay et l’Argentine. Il a atteint en octobre son plus bas niveau depuis 50 ans. Selon l’Institut national de l’eau Argentin, la situation n’est pas prête de s’améliorer. Les faibles précipitations devraient se poursuivre, et maintenir à un faible niveau les fleuves de la région. Cette situation hydrologique a fragilisé le commerce fluvial sur la voie principale Paraná / Paraguay qui compte pour une part majeure dans l’économie paraguayenne. Les charges des bateaux ont dû être réduites de 40 %, alors que le trafic avait déjà été ralenti par la pandémie de Covid-19. A hauteur du port de « La Paz » en Argentine, les barges qui viennent du Paraguay et d’autres convois qui naviguent vers le nord rencontrent des difficultés en raison de la faible hauteur d’eau.

Les zones humides en danger

Sans les précipitations habituelles et ravagées par les incendies, les zones humides ont aussi particulièrement souffert. Dans le delta du Parana, les feux ont frappé dès janvier, avec une intensité sans précédent, transformant au fil des mois des dizaines de milliers d’hectares en déserts de cendres.

Au Brésil, le Pantanal, plus grande zone humide tropicale du monde située au centre-ouest (état du Mato Grosso), a subi de violents incendies cette année, amenant de nombreux observateurs à parler de catastrophe écologique. Plus de 16 000 départs de feu ont été comptabilisés dans la région dont les plus récents, pendant la période sèche, ont souvent été incontrôlables. Cette aire de biodiversité exceptionnelle, abritant quelque 650 espèces d’oiseaux, 98 de reptiles et 159 de mammifères, aurait déjà perdu, selon les experts, 20 % à 25 % de sa superficie, soit 3 millions à 4 millions d’hectares partis en fumée. 

À l’origine de ces incendies : la forte sécheresse que la région subit. Durant la dernière saison des pluies, entre octobre 2019 et mars 2020, le niveau des précipitations dans le Pantanal a chuté de 40 % par rapport à la moyenne tandis que les températures grimpaient. Et le fleuve Paraguay, principal « robinet » et pourvoyeur en eau du grand marécage, s’est retrouvé brutalement à sec cette année.

Le monde agricole est aussi pointé du doigt en Argentine et au Brésil. La culture des brûlis (défrichements par le feu pour étendre les surfaces agricoles et zones d’élevage) contribue un peu plus à assécher les sols.

Enfin, la responsabilité est également politique. En premier lieu au Brésil, où le gouvernement en place rejette la réalité du changement climatique : arrêt des actions de surveillance des agences publiques environnementales dans les zones protégées ; absence d’actions préventives des incendies ; poursuite de la déforestation de l’Amazonie qui aurait, selon les scientifiques, un impact significatif sur le cycle des pluies dans le pays, en particulier dans le centre et le sud. Ailleurs, beaucoup d’ONG appellent à renforcer le dialogue entre les différents acteurs pour mieux réglementer l’usage et la protection des sols alors que les épisodes de sécheresse devraient se multiplier en raison du changement climatique.

Crédit photo : Ahmad Masood/REUTERS

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