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Des produits pharmaceutiques dans tous les fleuves du monde

Pire que ce l’on pensait… Selon une étude inédite par son ampleur menée par une équipe scientifique de l’Université de York, la pollution pharmaceutique affecte tous les cours d’eau du monde. Leur concentration constitue désormais une menace à la fois pour ces écosystèmes et pour la santé humaine.

 

Une étude à large échelle

Cette étude est exceptionnelle, autant par sa méthodologie que par ses résultats. L’équipe de l’Université de York (Royaume-Uni), qui a réuni 127 chercheurs de différents instituts de recherche dans le monde, a ainsi prélevé plus de 1 000 échantillons dans 258 rivières et fleuves, couvrant ainsi 104 pays et plus de 471 millions de personnes. Les précédentes études ne couvraient que 75 pays, majoritairement en Europe et en Amérique du Nord.

Elle révèle que les médicaments sont massivement présents dans les cours d’eau. Seules deux rivières en Islande et une autre près d’un village du Venezuela dont les habitants n’utilisent aucune médecine moderne, ont été totalement épargnées par la pollution pharmaceutique. Surtout, la concentration de produits pharmaceutiques dans les cours d’eau atteint désormais des niveaux dangereux.

Les concentrations les plus élevées ont été relevées à Lahore, au Pakistan, à La Paz, en Bolivie, et à Addis-Abeba, en Éthiopie. D’autres régions du monde sont touchées : les rivières de la capitale belge Bruxelles, du Luxembourg et de Dallas (Etats-Unis) figurent parmi les 20 % de cours d’eau présentant la plus forte concentration de médicaments. Même en Antarctique, quatre types de produits pharmaceutiques ont été détectés ! Et la rivière Kai Tak, à Hong Kong, contient 34 produits pharmaceutiques différents identifiés. Globalement, un quart des rivières de l’ensemble du globe contiennent des substances médicamenteuses à des niveaux considérés comme dangereux, selon les auteurs. La connaissance doit encore progresser, mais on sait déjà que le cocktail de plusieurs composés chimiques démultiplie leurs effets néfastes.

Les concentrations sont les plus fortes là où le traitement des eaux usées est le moins efficace ou à proximité d’usines de fabrication de médicaments. Cette pollution reflète nos modes vie : des médicaments utilisés pour traiter le diabète et l’épilepsie ont été trouvés dans de nombreux échantillons ainsi que des antidépresseurs, des antihistaminiques, des anesthésiques et des antibiotiques.

 

Une nouvelle résistance aux médicaments

La découverte d’antimicrobiens (dont font partie les antibiotiques) à forte dose dans les cours d’eau est particulièrement inquiétante : leur présence permet en effet aux bactéries de développer de nouveaux mécanismes de défense, ce qui peut réduire l’efficacité de ces médicaments, indique l’équipe de recherche.

La résistance aux antibiotiques est devenue l’une des dix grandes menaces mondiales pour la santé humaine, selon l’OMS. Les infections bactériennes résistantes aux antibiotiques auraient tué près de 5 millions de personnes en 2019. Dans son document « Antimicrobial Resistance and Water : The Risks and Costs for Economies and Societies », le Forum économique mondial précise que jusqu’à 10 millions de décès par an d’ici à 2050 pourraient être causés par cette résistance aux antibiotiques.

 

Risques pour la santé des fleuves et des Hommes

La présence de produits pharmaceutiques dans les eaux douces affecte toute la chaîne du vivant : des médicaments, tels que les contraceptifs, peuvent empêcher les poissons de se reproduire, voire féminisent les mâles, ce qui signifie une extinction à terme de l’espèce et moins de poissons à manger pour la population, selon l’étude de York. Et les populations se trouvent également exposées, soit directement, par l’eau qu’elles boivent, soit par leur alimentation.

Plusieurs sources de pollution ont été identifiées par les chercheurs : les déchets hospitaliers, les stations d’épuration, les fosses septiques et les sites de fabrication de produits pharmaceutiques. Aujourd’hui, dans le monde, environ 80% des eaux usées sont rejetées dans l’environnement sans être traitées !

Nous savons qu’une bonne connectivité des égouts et un bon traitement des eaux usées sont la clé pour minimiser, mais pas nécessairement éliminer, les concentrations de médicaments« , a déclaré au Guardian le Dr John Wilkinson, qui a dirigé l’étude de l’université de York.

« Cependant, cela est extrêmement coûteux car cela implique beaucoup d’infrastructures ». Investir dans des infrastructures de traitement de l’eau plus efficaces est une des solutions. Changer la manière dont nous consommons des médicaments en est une autre, car il reste toujours des résidus de substances pharmaceutiques dans l’eau.

 

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